Cela n'aurait pas échappé à Monsieur de La Palice, le principe d'une CROISSANCE continuelle signifie TOUJOURS PLUS. Mais sans considération du COMMENT. Les inconditionnels de la croissance économique pensent que le taux de variation annuelle du P.I.B. se suffit à lui-même pour répondre aux attentes des marchés, sans qu'il soit nécessaire de tenir compte des conséquences environnementales et sociétales locales et globales de l'activité économique génératrice de cette croissance. C'est-à-dire sans les comptabiliser, ni même trop s'en préoccuper...
Effectivement, ni l'indicateur de croissance, ni les notes attribuées aux entreprises comme aux États par les agences de notation financière ne s'offusquent de la destruction de l'environnement, de ses conséquences immédiates et à long terme sur la santé des populations, pas plus que de l'exploitation des travailleurs les plus vulnérables allant mécaniquement de pair avec l'appauvrissement de la classe moyenne des pays développés... C'est ainsi qu'il faut compter sur des économistes chinois dissidents sans peur pour nous alerter sur le mythe du taux de croissance chinois et sur le mirage du développement socioéconomique de la Chine !
Même les agences de notation extra-financière négligent généralement d'évaluer les relations entre agents économiques d'une même filière produit ou service. La RSE d'une entreprise envers l'ensemble de ses partenaires économiques, comme leur comportement sur marchés de Biens & Services, de l'emploi, et financiers, est donc ignorée. Lesquels, en retour (feed back), impactent l'ensemble de l'économie et des sociétés.
Les enjeux de Développement Durable relevant typiquement de problématiques systémiques, toute évaluation RSE aussi. Quelle pertinence et quelle fiabilité accorder à une évaluation non systémique de la RSE des entreprises comme de la gouvernance des États ? C'est-à-dire une analyse ne tenant compte ni de l'interdépendance des agents économiques, ni de leurs inter-actions, ni de leurs synergies, ni de leurs potentiels effectifs, ni de la polarité du pouvoir entre client et fournisseur, etc.
Si au contraire, conscients des périls conjugués dus au renoncement des États démocratiques à leur rôle et leur devoir de régulation, gouverne- ments et/ou populations reprennent les rênes de l’intérêt général :
il est évident que, partout où des êtres humains souffrent de la faim ou d’autres handicaps physiques, psychiques, sociaux dus à une grande pauvreté, ou d'autres formes de privation de leurs droits fondamentaux, le développement socioéconomi-que demeure un objectif impératif, indissociable de la justice sociale, de la solidarité et de la démocratie.
La gouvernance des enjeux sociétaux et environnementaux doit donc être renforcée par les États dont les réglementations nationales les prenaient déjà en compte.
Elle doit simultanément être enfin instaurée à l’échelle inter- nationale, et conditionner un libre-échange à l'intérieur de zones de relative homogénéité socioéconomique, soumises à un niveau équivalent d’exigence réglementaire environnemen- tale, sociale, fiscale et monétaire, et entre elles via un sas d'équilibrage RSE & DD. Les délimitations de ces zones pouvant évoluer au fil du rattrapage DD des moins développées.
Conditionner la circulation des capitaux, comme celle des biens et services, à la fiscalisation des profits, sur un mode permettant de remédier au dumping fiscal et donc au déficit budgétaire croissant des États.
Si le plein emploi ne pouvait pas être assuré du fait de l’évolution des modes de production, il faudrait en conclure à la nécessité d’un type de société moins travailliste, mutualisant davantage la répartition des fruits de l’activité économique (protection sociale, retraites et pensions, revenu de subsis- tance, etc.) selon de nouveaux modes aptes à garantir la cohésion sociale, la paix et la démocratie, sans renouer avec les pires erreurs du passé. Mais mettre un terme au processus de rouleau compresseur socio- économique et environnemen- tal dû au dumping généralisé généré par un libre-échange inconditionnel, est susceptible de redynamiser production et services et recréer de l'emploi durable, territoire par territoire.
Ce n’est selon nous qu'à ce prix que pourra repartir dans un sens plus vertueux la roue d’un développe- ment socioéconomique soutenable en tout lieu, profitable au plus grand nombre, favorable à une coopéra- tion pacifique entre les nations, et à des échanges dépassionnés plus harmonieux entre les peuples…
La loi des marchés n'a que faire des enjeux de DD sociétaux et environnementaux.
Elle s'impose à celle des États, qui leur ont peu à peu aban- donné tout pouvoir.
Les profits mondialisés s'étant affranchis de la fiscalité des États régulateurs, ceux-ci ont perdu leur souveraineté finan- cière et donc budgétaire, voire leur légitimité démocratique
Les grands équilibres macro- économiques dont la régulation étatique avait la charge, se dissolvent.
La théorie du ruissellement fonctionne à l’envers : le plus grand nombre enrichit à ses dépens une élite locale et mondiale, qui assujettit partout populations et environnement.
Si un sursaut démocratique ne se produisait pas, à l’initiative des États ou, à défaut, à celle des peuples, il faudrait acter un renoncement à toute soutenabilité économique. Exit le DD. Ce serait alors bien sûr la non-voie du pire…
Les plus grands groupes industriels, commerciaux et financiers, font un usage croissant du concept de Développement Durable dans leur communication (rapports DD et RSE, marketing et publicité). Or ils sont dans le même temps les plus fréquemment mis en cause quant à leurs pratiques réelles (environnementales, sociétales et économiques), y compris à l'égard de leurs partenaires :
sous-traitants, prestataires et fournisseurs, notamment dans
les pays les moins développés ou les moins démocratiques.
Au final, c'est le concept même de Développement Durable qui est remis en question par les partisans de la décroissance, considérant que, pour les acteurs économiques se réclamant du DD, la notion de développement demeure trop indissociable de la croissance économique pour être crédible, celle-ci étant non soutenable par définition, autrement dit non durable.